Introduction
Faut-il acheter du Pinel ? Oui mais… Je vais ici partager mon point de vue critique sur le sujet. Il y a beaucoup de points positifs au Pinel : répondre aux besoins de logements locatifs, apporter des logements décents et confortables, défiscaliser etc. Cependant, d’un point de vue environnemental et architectural, il y a beaucoup de points négatifs. C’est ce regard là que je vais vous donner ici.
Le logement est devenu un produit financier
Notre pays est un berceau historique de la civilisation occidentale. Des bâtiments vieux de plusieurs dizaines de siècles, faits avec bon sens pour servir leurs occupants, les protéger et pour être transmis des siècles durant, de génération en génération sont parvenus jusqu’à nous aujourd’hui. Je me révolte de constater qu’aujourd’hui, les biens immobiliers neufs deviennent des produits de consommation, des sources de rentabilité locative ou fiscale où la qualité n’est plus le critère numéro un.
Les lois de défiscalisation de la construction neuve, aujourd’hui loi PINEL en vigueur, ne font qu’accentuer cette dérive de la société de consommation depuis la fin des années 90. Son principe est de favoriser la construction de logements locatifs neufs à moindre coût, financés par une catégorie de personnes éligibles à bénéficier en retour d’une défiscalisation de leur investissement, sous réserve de plafonnement du loyer et de condition de ressource de leurs locataires, pour une durée de 6 à 12ans.
Une qualité du logement à la baisse
Malheureusement, les personnes qui paient pour la construction de ces logements neufs ne s’intéressent que trop peu à ce qu’ils sont en train de faire construire. Rares sont les propriétaires qui viennent vérifier la qualité de la construction avant d’acheter du PINEL.
De plus, dans la majorité des cas, l’architecte est écarté du projet avant même la remise des offres par les entreprises de construction. Les prix sont alors tirés vers le bas lors des négociations (variantes économiques, gestes commerciaux, délai d’exécution ultra rapide etc.). Le suivi de chantier est ensuite confié à un maître d’œuvre dont les intérêts sont les mêmes que les promoteurs : terminer rapidement le chantier, avec la meilleure marge possible, souvent au détriment des prestations finales puis passer au projet suivant.
Excepté dans le cadre de projets certifiés, le coût de la construction est tiré vers le bas dès la conception. Les promoteurs demandent aux architectes de concevoir un maximum de logements possibles, les moins chers possibles. Les matériaux sont donc bas de gammes. Ils ne sont pas issus de filières éco responsables, ni durables ou renouvelables. Le seul objectif est alors la rentabilité financière et non une consommation raisonnée et durable de nos ressources.
Heureusement, des normes et règlements régissent la construction et garantissent un minimum de qualité. Mais les finitions sont souvent bâclées. Les surfaces des pièces, la hauteur sous plafond, le nombre de fenêtre sont à minima pour réduire les coûts. Les hauteurs sous plafond sont à minima pour rentrer un maximum d’étages, et donc de logements, dans la hauteur autorisée au PLU. On observe parfois des espaces complètement incongrues, biscornus, impossibles à aménager. Etc.. Pourtant, tout cela est conforme à la norme et tous les critères sont réunis sur le papier.
De même, la cuisine à l’américaine, ou cuisine ouverte, est devenue une norme officieuse au détriment des mètres carrés habitables. Les logements proposés aujourd’hui ne permettent même plus de séparer la cuisine si on le souhaite. Il y a même souvent qu’une seule fenêtre pour l’espace cuisine / séjour. Aussi, les logements sont de plus en plus profonds, petits, mono orientés, les rendant sombres et difficiles à ventiler.
Un rapport qualité/prix loin d’être au rendez-vous
Le calcul de défiscalisation plafonne le montant maximal d’investissement pris en compte. Cela incite donc les acheteurs et les promoteurs à plafonner eux aussi le coût de leur investissement, déjà en grande partie dépensé dans l’achat du terrain, le coût de la commercialisation et la marge du promoteur et des banques. Il reste alors plus grand chose du prix de vente pour les travaux.
D’ailleurs, sait on jamais vraiment combien ont réellement coûté les travaux ? Le rapport qualité/prix est souvent loin d’être au rendez-vous. La force des promoteurs étant d’apporter le terrain avec la construction, il est souvent difficile de connaître réellement le coût des travaux.
De plus, ces logements ont une durée de vie pré définie de 10ans environ (durée de la garantie décennale et durée de la défiscalisation). Les matériaux et équipements choisis sont donc en adéquation avec cette temporalité.
Enfin, les propriétaires/bailleurs/investisseurs ne sont pas dans une logique d’entretien et de rénovation. Lorsque deviennent nécessaires les premiers travaux sur la copro, ces derniers ont plutôt tendance à vouloir revendre leur bien qu’à investir dedans. Les bâtiments sont alors laissés à l’abandon et se dégradent rapidement dans l’attente de leurs nouveaux propriétaires.
Investisseurs, prenez vos responsabilités !
Alors s’il vous plaît, avant d’acheter du PINEL, de participer à la construction d’un logement locatif neuf sous loi PINEL, renseignez vous. Mettez vous face à vos responsabilités de maître d’ouvrage. Demandez à visiter le chantier. Lisez les descriptifs techniques. Regardez les plans. Posez-vous la question : est ce que je me verrais vivre dedans avant d’acheter du PINEL !
Vous pouvez vous faire conseiller par un architecte, par le CAUE ou toute autre personne pouvant vous apporter un regard critique et constructif sur le sujet. Vous pouvez aussi vous tourner vers la loi MALRAUX en attendant que la PINEL s’améliore. MALRAUX, elle, valorise le patrimoine bâti existant, souvent de meilleure qualité car construit pour durer indéfiniment (sous réserve d’entretien).
La quantité doit elle primer sur la qualité ? Peut être est il temps de faire moins mais mieux ? Le nouveau texte de loi « Pinel Plus », à venir en 2023, favorisera les logements avec une double orientation pour les T3 et plus, imposera des surfaces minimales par typologie, un minimum d’extérieur privatif. C’est donc bien là le signe qu’il y a des abus qui doivent être réglementés pour disparaître.
pour aller plus loin
- Loi Pinel : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F31151
- Loi Malraux : https://www.impots.gouv.fr/particulier/immeubles-speciaux-0
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Dernière mise à jour le 15 janvier 2023